21 JOURS pour des relations positives #15. Réparation

Certes, il semble y avoir des gens qui entretiennent systématiquement des relations toxiques, voire abusives, avec de nombreuses personnes. Des gens qui n’ont que peu de vrai·es ami·es – plus des relations de travail ou de voisinage -, qui se fâchent avec tout le monde, disent du mal des autres, n’ont eux-mêmes jamais tort, tandis qu’ils trouvent que « les autres » ont des torts à leur égard et se comportent mal…
Ne parlons pas de ces gens-là. J’en connais un rayon, et quand j’en parle, cela réactive des schémas douloureux et je suis vite déprimée. Or, là n’est pas l’enjeu de ces articles, puisqu’au contraire, mon objectif est de définir ce que sont des relations « positives ».

Partons donc plutôt d’une relation globalement positive.

On parle parfois de « personnalités toxiques », mais il peut aussi y avoir des « relations toxiques » : à savoir, deux personnes qui, entre elles, ne se font pas du bien, voire se font du mal.
On peut cependant encore restreindre notre champ d’observation et passer des relations aux comportements : plus encore que des relations toxiques, voire abusives, il existe des comportements toxiques ou abusifs. J’en ferai certainement une liste un jour, afin de pouvoir l’avoir sous la main quand on s’interroge sur quelqu’un·e, une relation ou un comportement récurrent.

Ce dont je veux parler aujourd’hui, c’est de la possibilité de comportements abusifs entre deux personnes au sein d’une relation globalement positive. L’enjeu est alors à mon sens, de les repérer, de les signifier, et de pouvoir en parler ensemble. Que la personne qui a « débordé » le reconnaisse, et présente ses excuses.
Et que les deux aient l’impression, d’une fois sur l’autre, que les conflits s’apaisent, sont moins violents, ou se règlent plus facilement. Autrement dit, qu’on ait l’impression de progresser, d’avancer sur notre chemin, et non de stagner ou pire, de régresser.

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Personne n’est à l’abri d’un comportement abusif. Chacun·e de nous a des « triggers » : des « boutons » sur lesquels parfois un·e autre appuie sans le faire exprès, ou même en avoir conscience. Chacun·e est susceptible de craquer à un moment : certain·es, en criant, d’autres en pleurant, d’autres encore en se repliant sur elleux-mêmes, voire en « boudant ».
L’enjeu, encore une fois, est de le reconnaître et de pouvoir en reparler, une fois le moment de « crise » passé.

L’autre enjeu à mon sens, au milieu de cette « crise », est de contrôler son comportement : si on ne peut pas « contrôler » ses émotions – qui nous viennent tout droit de nos ancêtres des cavernes – on peut en revanche apprendre à contrôler notre comportement. Et, par exemple, s’interdire absolument de dire du mal de l’autre, l’accuser, lui faire des reproches ou des critiques.

Quand il m’arrive (j’avoue…) encore parfois de perdre patience et de crier sur mes enfants, je fais malgré tout attention, au moment de mon débordement, à parler de moi (Je n’en peux plus, Je suis fatiguée, J’ai besoin que vous me laissiez tranquille cinq minutes…) et non pas d’elleux (j’évite les Vous êtes vraiment insupportables, et les Je n’en peux plus de vous).

Ce qui caractérise, pour moi, une relation positive, n’est pas qu’il n’y a pas de conflit – car il y en a, nécessairement : on ne peut pas toujours être d’accord sur tout – mais qu’on puisse en parler, qu’on sache reconnaître ses torts, présenter des excuses, comprendre ce qui a pu se passer… pour éviter que ça ne se reproduise, et/ou faire en sorte que ça se règle plus facilement la fois suivante.

Quelqu’un me disait l’autre jour en parlant de mon fils : « Ce qui est étonnant, c’est qu’il a des émotions fortes, certes, mais surtout qu’il est capable de les analyser. Il a conscience de ce qu’il se passe en lui. »

C’est en effet une des caractéristiques de l’intelligence émotionnelle, et de la « Mindsight« , à propos de laquelle j’ai écrit 21 articles il y a un an (si vous n’en lisez qu’un, lisez celui-ci, inspiré précisément de mon fils : Mindsight à 10 ans) :

  1. Pouvoir observer et analyser ce qu’il se passe en nous : insight.
  2. Observer et comprendre ce qu’il se passe en l’autre : c’est l’empathie.
  3. Mettre ces observations et compréhensions au service de la relation.

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Pour vous donner un exemple concret de comment chacun·e d’entre nous peut avoir ponctuellement un comportement abusif au sein d’une relation positive, je me propose de vous raconter une scène dont je n’étais pas fière sur le moment, mais que j’intègre aujourd’hui comme faisant partie de mon  « expérience » sur mon chemin d’apprentissage – en espérant que je saurai repérer et faire mieux la prochaine fois !

Je vous passe les détails de la première partie : scène pénible avec ma mère, suite à un différend par rapport à ma fille. J’ai réussi à avoir « seulement » envie de crier et à ce que les « cris » sortent plutôt en larmes de rage dans les bras de mon aimé, qui m’a aidée à canaliser mes émotions sur le moment. J’étais plutôt contente de moi.

En revanche, un peu plus tard dans le métro, j’ai commencé à lui reprocher des petits détails sans importance, à le « houspiller ». Quand j’en ai pris conscience – tandis que lui attendait que ça passe – j’en ai été mortifiée :  j’étais énervée à l’intérieur. J’aurais en réalité eu besoin d’au moins dix minutes de pause, voire vingt, après la scène précédente, afin de permettre à mon émotion de retomber. Sauf qu’on était déjà en retard.
Alors ma colère toujours présente en moi – présence de cortisol et d’adrénaline : cette sensation physique désagréable – s’est déportée sur lui. Typique, malheureusement.

Typique du parent qui a un souci au bureau, ne prend pas le temps de se poser en arrivant chez lui car ses enfants lui sautent dessus, et qui les dispute pour un rien – alors que la même chose, un autre jour, serait passé comme une lettre à la poste.
Typique du·de la professeur·e qui s’est disputé·e avec son·sa conjoint·e le matin, et prend la mouche au premier élève un peu dissipé, infligeant un contrôle surprise à toute la classe, pour, en réalité, avoir la paix quelques minutes.
Typique du chat qu’un enfant a embêté… et qui se venge sur l’autre chat de la maison.

Autrement dit, l’état émotionnel dans lequel on se trouve a été déclenché par une interaction avec une personne… et c’est quelqu’un·e d’autre qui, se trouvant malencontreusement sur notre route un peu plus tard, « éponge » la colère : injuste.

Et non seulement injuste, mais aussi « incohérent » pour la victime, susceptible alors, si elle ne sait pas se protéger et a oublié de mettre son bouclier, de se demander : Mais qu’est-ce que j’ai bien pu faire ? et qui bien sûr, ne trouve aucune réponse à sa question.

D’où l’importance d’expliquer aux enfants que quand un·e adulte les punit ou leur crie dessus, c’est lui·elle qui a un problème et n’a pas su gérer ses émotions : l’enfant n’est jamais responsable de la perte de contrôle d’un·e adulte.

Quand un·e adulte dit :
Tu me rends dingue ! Tu me mets hors de moi ! Tu es insupportable ! 
Ce qu’ielle dit en réalité, c’est :
Mes émotions me débordent ! Je n’arrive pas à te supporter.

C’est évidemment la même chose pour toute relation entre deux adultes. D’où l’importance d’apprendre à voir et entendre avec nos « oreilles de girafe » de la communication non-violente : savoir que si notre partenaire, notre ami·e, notre collègue… craque et nous traite mal à un moment donné, c’est son problème, et qu’on n’y est pour rien.

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N’empêche : pour que la relation demeure positive, il est nécessaire que cette personne, une fois passé le moment difficile, réalise qu’elle a été injuste, que son comportement a été inadéquat, et vous présente des excuses.

Il est important que – si vous le souhaitez, si vous en éprouvez le besoin – vous puissiez revenir sur l’épisode et exprimer votre incompréhension, tristesse ou même colère, et dire : Quand tu m’as reproché telle ou telle chose, je me suis senti·e triste ou en colère, parce que…
Important alors que l’autre, à son tour, entende avec ses oreilles de girafe sans en prendre la mouche (cf #12 sur la sécurité), afin que la relation et la connexion émotionnelle entre vous puissent être rétablies.

En l’occurence, pour finir mon histoire, quand j’ai pris conscience que je « cherchais des poux » à mon aimé alors qu’il n’y était pour rien, j’ai fondu en larmes et lui ai demandé pardon. Et ma colère s’est aussitôt envolée. Comme si, physiquement, les larmes permettaient de « nettoyer » et évacuer les hormones du stress qui restaient encore en moi après la crise, et de revenir à un état physique plus serein.

Soulagée, j’ai alors voulu revenir sur ce qu’il s’était passé en moi. Mais mon aimé m’a alors signifié que lui-même était à ce moment-là encore « fermé » et avait à son tour, besoin de quelques minutes pour « redescendre ». On s’est alors accordé l’un·e l’autre dix minutes de pause et de silence dans le RER. Puis on a pu se prendre dans les bras, se dire qu’on était désolé·es, comprendre ce qui s’était joué… et se promettre d’essayer de faire mieux la prochaine fois.

C’est en cela que pour moi, notre relation est « positive », même si l’un·e ou l’autre peut parfois avoir un comportement malencontreux, ou inintentionnellement blesser l’autre. L’important est de pouvoir en parler, l’analyser, se présenter des excuses et… faire de notre mieux pour progresser.

Hâte de lire vos commentaires.

Au plaisir,
avec amour et bienveillance,
Isabelle

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