21 JOURS pour des relations positives #19. Collaboration

Bonjour. Je suis l’autre. « L’aimé ».

Isa m’a demandé d’écrire un article pour son blog. Pour qu’elle ne soit pas la seule voix, le seul point de vue, en particulier du fait qu’elle utilise nos expériences de vie en commun pour alimenter ses réflexions et ses écrits.

Je profite donc de l’occasion pour d’abord confirmer que les faits qu’elle rapporte sont véridiques. Qu’il n’y a aucune invention, projection, romantisation, idéalisation. Que c’est certes sa vérité, sa vision des faits, mais que celle-ci correspond à ma vision des faits également, ainsi que la communication compassionnelle (non violente) le conseille : toujours parler d’abord des faits tels qu’une personne extérieure pourrait les rapporter.

Ensuite, que les ressentis qu’elle exprime ici sont bien ceux que nous nous exprimons l’un à l’autre. Les observations qu’elle fait de son propre fonctionnement mental correspondent effectivement à ce qu’elle m’exprime, et ce qu’elle rapporte de nos conversations correspond à ce que nous nous disons. En beaucoup plus condensé évidemment puisque nos discussions durent en réalité des heures…

unknown

Je tiens à préciser cela parce que c’est d’une importance cruciale pour moi, dans mon histoire de vie. Avant de connaître Isa, je ne connaissais pas cela : un environnement sécure où les ressentis de l’un sont accueillis par l’autre, où la parole est libérée, où la confiance et la bienveillance constituent le socle d’une relation qui est nécessairement amenée à évoluer. Une relation où l’autre est par principe accepté pour qui il est, où on ne cherche pas à le changer pour qu’il corresponde à un pseudo-idéal, où en réalité on est excité par avance de voir l’autre évoluer au sein de la relation qu’on aura su établir, non pas sur des d’objectifs communs à atteindre ensemble, mais sur des principes partagés. Où le voyage est plus important que la destination. Où la fin ne justifie jamais les moyens, parce qu’en réalité, les moyens qu’on utilise révèlent qui nous sommes au fond, et la fin n’est en réalité jamais atteinte et somme toute, totalement illusoire.

Et quand je parle de « principes partagés« , je ne parle pas de promesses sur un avenir qu’on ne connaît pas – Je n’aimerai jamais que toi, je ne m’occuperai que de toi, je ne te quitterai jamais… Non. Notre relation s’est bâtie (très progressivement) sur quatre principes de fonctionnement :

– Le premier de ces principes, le plus essentiel, c’est de parler, le plus possible, de ce qui nous habite, de partager avec l’autre nos ressentis et nos conflits internes. Parler au « JE », oser exprimer toute la richesse des émotions parfois conflictuelles qui nous habitent et qui font de chacun de nous des êtres merveilleusement imparfaits.
Cette communication a trois vertus essentielles : nous connaître et nous accepter tels que nous sommes ; permettre à l’autre de nous connaître tels que nous sommes ; et faire diminuer l’intensité des émotions et nous permettre de travailler dessus.

– Le second principe, nécessaire au premier, est d’accepter et d’accueillir la parole de l’autre quand il parle de lui.
Toutes les réalités personnelles sont bonnes à dire, toute émotion est légitime.

– Le troisième, nécessaire pour une communication claire, est de ne jamais se mentir. Ne jamais dire ce que l’on pense que l’autre attend que l’on dise par peur de dire ce qu’on a vraiment au fond du cœur. Et comme l’autre accepte ma vérité par la vertu du second principe, je n’ai rien à gagner à ne pas la partager ou à la travestir.

– Le quatrième principe, qui découle logiquement des précédents, c’est la liberté. Chacun est libre de choisir ce qu’il souhaite vivre, ou ne pas vivre. La communication permet de tenter d’accorder nos besoins, de respecter nos libertés respectives.

Je vous donne cela comme une recette toute faite, mais en réalité, elle est le fruit d’une longue maturation. Nous avons découvert ces principes au fur et à mesure, après bien des écueils. Et leur application quotidienne reste difficile. Mais nous sommes rarement en difficulté tous les deux en même temps, et nous nous aidons mutuellement en offrant des espaces de parole, en questionnant les besoins de l’autre, en faisant preuve de la bienveillance et de l’empathie qui sous-tendent ces principes et qui sont les conditions essentielles de leur mise en oeuvre.

Et je suis bien placé pour savoir qu’il existe des relations où la bienveillance et l’empathie ne sont pas présentes, et où la communication est donc difficile. Où on exprime des jugements, des accusations, des « TU », où l’autre est coupable de ne pas être celui qu’on projetait.
Ou bien où on n’exprime rien, on n’ose pas dire à l’autre qui on est, de peur d’être jugé et rejeté, où on porte un masque et on reste dans son « rôle ».

La communication elle-même peut devenir un enjeu de pouvoir dans une relation difficile. « C’est trop difficile à exprimer« , « Je ne te le dirai pas« , « Je ne te parle plus« , « Réfléchis un peu« , « Tu le sais très bien« …
Ou à l’inverse : « Tais-toi« , « Je préfère ne pas le savoir« , « Si tu dis cela, je ne le supporterai pas« …

Certes on a le droit, le devoir même, de dire qu’il y a des situations oû l’émotion est trop présente pour que la communication puisse s’établir harmonieusement, et donc demander et s’accorder des pauses, pour permettre à l’émotion de redescendre. Mais ces pauses doivent être courtes, car la relation ne peut continuer pendant ces pauses.
Couper la communication, c’est tuer la relation à plus ou moins long terme.

Pour moi c’est cela le message le plus important : si vous ne pouvez pas exprimer votre moi profond à l’autre, vous ne pouvez pas espérer construire à long terme une relation enrichissante pour aucun des membres.
Ce sera une relation d’un autre type : une dépendance émotionnelle ou matérielle, où l’autre n’est pas un partenaire mais un inconnu inquiétant, une source de dangers qu’il faut maîtriser.
Une relation où chacun se sent incroyablement seul.

Sachez que ce n’est pas une fatalité. Qu’il existe d’autres relations que les relations de dépendance. Qu’elles sont incroyablement plus enrichissantes. Qu’elles sont semées d’embûches, qu’il faut pratiquer à la fois le lâcher-prise sur les éléments qu’on ne peut contrôler (les autres), la connexion à soi-même pour explorer nos peurs les plus profondes, et l’accueil bienveillant des autres qui font un chemin parallèle.
Et que la clef qui permet de dégonfler ces obstacles apparemment insurmontables, c’est la communication compassionnelle.

Isa nous montre un exemple de cette communication à travers son blog et son envie de transmettre ses expériences et ses lectures à d’autres qui se posent des questions similaires. Questions qui sont d’autant plus importantes à l’époque où nous vivons.

Deux chemins s’offrent à nous : souhaitons-nous faire advenir pour nos enfants un monde d’affrontement, où nous devons accaparer pour nous-même des ressources finies (temps, attention, amour, travail, argent, ressources naturelles), où notre « bien-être » prime sur celui des autres et où il y a forcément des gagnants et des perdants, un monde de solitude ;
ou au contraire, un monde de partage, d’écoute, de curiosité, de découverte de richesses insoupçonnées en nous-même et dans les autres, de travail en commun vers un bien-être plus universel ?
J’ai connu et vécu le premier de ces chemins, et maintenant j’ai choisi le second.

Loïc

———-

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *