Depuis hier, je me sens comme « en résistance ». J’alterne entre des moments où je me sens « speed », où j’ai l’impression que tout m’agresse (alors je « résiste », au risque d’agresser les autres sans même m’en rendre compte sur le moment), soit au contraire où je m’effondre… et où alors après, je me sens complètement vannée, comme sonnée.
L’un entraînant l’autre comme dans une réaction en chaîne, sans doute, je vis des montagnes russes émotionnelles.
Entre les deux, travaillant sur moi, je réussis malgré tout régulièrement à me connecter à moi-même, à mon centre, et à l’amour en moi. Je m’accepte alors telle que je suis, avec mes failles, mes fragilités, mes blessures, mon hypersensibilité à fleur de peau, et sans doute un stress post-traumatique réactivé ces jours-ci par le contrecoup des attentats, et qui expliquerait ces états d’alternance.
M’observant sans concessions mais avec bienveillance, j’ai pris conscience que quand je me sens agressée et que je passe en mode défensif pour tenter de minimiser les sources de stress supplémentaires autour de moi, je peux moi aussi agresser mes interlocuteurs, sans même en avoir conscience… et participer ainsi à créer un monde de violence autour de moi – qui est ce que précisément je cherche à fuir.
La colère que je ressens en moi est souvent projetée, provoquée par l’idée de ce que j’attends de l’autre ou de comment je voudrais qu’il soit ; sans le voir tel qu’il est vraiment. Si quelqu’un ne se comporte pas avec moi comme je le voudrais, je me sens agressée, non respectée… et si je le lui renvoie, je l’agresse à son tour : c’est un cercle vicieux dans lequel je ne peux recevoir à mon tour que de la violence – dont le malaise en moi est la cause première.
La pratique de la mindsight consiste à se voir soi-même (insight), voir en l’autre (empathie) et avoir une vision de notre interconnection et de notre interdépendance. Nous formons un tout avec les autres.
Si j’agresse l’autre, je m’agresse moi-même : si je suis en mode défensif, je renvoie à l’autre de la défiance, et pour peu qu’il soit lui-même peu emphatique, il le ressent comme de l’agression, et m’agresse à son tour – pour se « défendre », prétend-il.
Il ne s’agit certainement pas de tout accepter sans réagir. Mais de ne pas réagir tant qu’on ressent de la colère en nous. La colère est comme un bébé : quand elle se réveille, quand on la sent se réveiller en nous, il faut en prendre soin.
Il nous faut retrouver notre calme et notre sérénité AVANT de réagir : si l’on réagit sur le mode de la colère, elle a de fortes chances de nous déborder… et de nous revenir en boomerang.
La méditation de bienveillance (lovingkindness en anglais) permet de se connecter aux autres en tant qu’êtres humains, comme nous animés du désir de vivre heureux et d’être protégés de la souffrance.
Nous sommes tous vulnérables, tous faillibles, tous sur terre en même temps et soumis aux mêmes aléas : que nous soyons riche ou pauvre, jeune ou vieux, bien portant ou malade, notre vie peut s’arrêter d’une seconde à l’autre parce qu’un autre en aura décidé ainsi.
Si les attentats de cette semaine nous bouleversent tant, même quand on n’est pas touché « directement », même si l’on a essayé de s’en protéger du mieux que l’on a pu… c’est aussi parce qu’ils nous renvoient à ce que notre inconscient essaie de nier le reste du temps : l’immortalité en nous n’est qu’une illusion, en réalité nous sommes mortels, et la mort peut nous faucher, nous ou celles et ceux que l’on aime, à chaque coin de rue, à chaque instant.
Dans la méditation de bienveillance, l’idée est de se connecter en pleine conscience à quelqu’un(e) que l’on aime et dont sait qu’il/elle nous aime, de se connecter à cet amour et cette bienveillance dont on se sent alors rempli(e) et entouré(e).
De lui souhaiter, comme on se souhaite à soi-même, d’être serein, en santé et en sécurité.
Puis de se connecter à une personne que l’on ne connaît pas vraiment (par exemple que l’on croise parfois dans la rue), et de lui souhaiter d’être serein, en santé et en sécurité.
Puis de penser à une personne avec laquelle on a des rapports plus compliqués, plus douloureux. Et de lui souhaiter à son tour d’être serein(e), en santé et en sécurité.
Selon la personne que l’on choisit, ce n’est pas toujours simple : on voit alors parfois ressortir des rancunes, des colères, des sentiments de défiance… Ce sont autant de précieux indicateurs qui nous permettent de savoir précisément où l’on doit travailler sur nous-mêmes.
Enfin, on se connecte à tous les êtres vivants que porte cette planète. Et on leur souhaite d’être en sécurité, en santé, et sereins.
Et on se sent soudain porté(e) par tout cet amour et cette bienveillance en nous.
Il se dit (et il est apparemment prouvé) que si l’on pratique régulièrement cette méditation de bienveillance, notre cœur va s’ouvrir, s’agrandir, s’apaiser.
Que la prochaine fois que l’on croisera une personne avec laquelle on a des relations compliquées, on devrait être moins sur la défensive, plus ouvert(e) au dialogue : on aura alors plus conscience que chacun(e) fait de son mieux, avec les moyens et l’histoire qui sont les siens, et cela devrait nous aider à échapper à la colère en nous.
C’est tout le bien que je me souhaite. Et que je vous souhaite.
Avec amour et bienveillance.
À demain,
Isabelle