Du point de vue qui est le mien, celui de l’éthique des relations, je souhaite aujourd’hui réfléchir autour de l’idée que : Chacun·e a le droit au respect, et en particulier, de se définir soi-même.
En réalité, personne ne peut savoir à ma place ce que je pense, ce que je ressens, ce que je souhaite, quelles sont mes intentions ou mes motivations.
Cellui qui prétend le savoir… est dans l’absurde, le non-sens, et dans l’abus : ielle outrepasse mes limites psychiques (j’y reviendrai demain).
J’ai découvert cette réflexion autour de ce qu’est une relation verbalement abusive dans les livres de Patricia Evans il y a seulement quelques mois : et c’est comme si soudain tout avait pris sens pour moi, comme si toutes les pièces d’un puzzle jusque-là éparpillées… trouvaient enfin leur juste place.
Li’dée principale est que dans notre société (patriarcale, hiérarchique), au lieu de reconnaître que chaque être humain ne peut légitimement que se définir lui-même, on marche à l’envers, dans le sens où on nous définit dès l’enfance de l’extérieur (outside in).
Les parents, en effet, ont souvent tendance à prétendre « mieux savoir que leur enfant » ce qui est bon pour lui, ce qu’il ressent, ce qu’il pense, ce qu’il a dans la tête. Mais non, tu ne t’es pas fait mal, c’est juste un bobo. Tu le fais exprès pour m’embêter ! Tu n’écoutes jamais ce que je te dis !
Or personne ne peut savoir à ma place ce qu’il se passe dans ma tête, mon corps, mes émotions, et je ne peux me définir que depuis l’intérieur vers l’extérieur : inside out (tiens, ça ne peut pas être un hasard : c’est le titre de ce fabuleux film des studios Pixar sur les émotions, malheureusement traduit en français par Vice-versa – ce qui lui enlève tout son sens).
Et pourquoi cette définition « de l’extérieur » ? Pourquoi certain·e·s se permettent-ielles de prétendre mieux savoir que d’autres ce qu’il se passe en elleux ? Parce qu’ielles se sentent « légitimes » dans leur supériorité.
C’est là que m’est utile l’image des deux échelles sur lesquelles peuvent se mesurer les relations que j’ai trouvée chez Elaine N. Aron : l’échelle verticale du ranking (celle des rapports de force et de pouvoir : de la hiérarchie) qui fait que les êtres humains se mesurent les un·e·s aux autres en supérieur·e·s ou inférieur·e·s – par contraste avec l’échelle horizontale du linking : celle du « lien », de l’amitié et de l’amour, et qui est altruiste, réciproque, mutuelle, égalitaire.
Reprenons. Autrefois – il n’y a pas si longtemps – l’homme avait pouvoir sur la femme (le droit de vote, d’avoir un compte en banque, etc, vous vous souvenez ? L’occasion de (re)voir l’excellente vidéo sur « Les Femmes« , à la fois éducative, informative et hilarante (parce que mieux vaut en rire qu’en pleurer…) de Et tout le monde s’en fout).
Or aujourd’hui, on voit bien à quel point c’est juste… absurde.
On continue pour autant à trouver ce rapport de force et de pouvoir « normal » (qui détermine une « supériorité » hiérarchique, le « tu me dois le respect parce que je suis ton·ta supérieur·e, j’ai plus de poids que toi dans la société – au sens de : plus de pouvoir) pour d’autres relations telles que :
- le parent sur l’enfant
- lea professeur·e sur l’élève (pourquoi ne dit-on pas enseignant·e / apprenant·e ?)
- l’employeur·se sur son employé·e.
Or, d’un point de vue éthique, fondamental, chaque personne étant un être humain : personne n’est supérieur à personne.
Pourtant certaines personnes se croient “supérieures” à d’autres et à ce titre, se permettent de les juger (des « jugements » de l’extérieur, qui, on le sait pourtant, parlent d’elles-mêmes et non de la personne qu’elles prétendent juger) et de mal leur parler, voire de leur donner des ordres.
En particulier, les enfants sont encore trop souvent considérés comme des “sous-êtres”.
Mon fils l’a très justement exprimé un soir lors d’un atelier de communication non-violente – et les quinze adultes présent·e·s autour de lui ont, je crois, été fortement ému·e·s, comme moi, en « comprenant » la souffrance quotidienne qui se révélait à nous ainsi – quand il a fait cette demande : Est-ce que cela vous serait possible, ce soir, de me considérer non comme « un enfant », mais comme « une personne » ?
Pour moi, cela voulait tout dire de la manière dont souvent les parents, les professeurs, les adultes dans leur ensemble, se permettent de mal parler aux enfants, de leur donner des ordres, de les rabaisser : ce sont des humiliations répétées (Ah surtout ne me réponds pas, ne sois pas impertinent !) et au quotidien, des émotions interdites d’expression que, petit à petit, l’enfant apprend à refouler – voire auxquelles plus tard, il n’aura parfois même plus accès.
Pour moi, si quelqu’un·e se permet de prétendre savoir ce qu’il y a dans la tête, le corps, les intentions de quelqu’un·e d’autre, ou de lui dire comment ielle « devrait » se comporter, ou de porter un jugement sur ce qu’ielle a fait… ielle est dans l’abus.
Or on l’a vu, les rapports de force et de pouvoir, et les relations abusives donc, sont inscrites pour la plupart d’entre nous, dès notre enfance : on les intègre comme « normales ». On croit « normal » d’être défini·e de l’extérieur, outside in – alors qu’en réalité, cela ne fait pas sens, et constitue déjà de l’abus.
Fondamentalement, personne n’a plus de valeur que quelqu’un·e d’autre, quel que soient, une fois de plus, son âge, son genre, son statut social. Personne ne peut prétendre savoir mieux que moi qui je suis, ce que je veux, ce que je ressens ou ce que j’ai dans la tête. L’autre est… autre, aussi légitime que moi en tant qu’être humain.
Hâte de lire vos commentaires, aujourd’hui plus que jamais.
Au plaisir,
avec amour et bienveillance,
Isabelle
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