Voyage en Polyamorie #4. 3. L’Éveil à moi-même

Pour celles et ceux qui prendraient le train en marche, nous voici arrivé.e.s à la 3ème étape de ce Voyage en Polyamorie que je me suis engagée à écrire en 21 jours d’articles d’affilée.
Après l’exploration du monde ordinaire de la monogamie érigée en norme (#2), un jour, il arrive (après un accident, une maladie, une séparation, ou bien… une rencontre) qu’on voit le monde différemment, tel qu’il est, et non plus tel qu’on a voulu nous faire croire qu’il était – c’est ce que j’ai appelé « la Désillusion » (#3).

J’aurais aussi pu choisir d’adopter les étapes proposées par Kim Hudson dans  The Virgin’s Promise – je ne crois pas que je me ferais jamais à ce titre, mais le bouquin est top, décrivant les étapes du voyage de l’héroïne (la part féminine en nous), plus tourné vers l’intérieur que celui du héros (le fameux côté du héros qui « part avec son épée chasser un dragon au fond de sa caverne » avec lequel j’ai toujours eu un peu de mal à m’identifier !).

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Elle appelle l’étape #1 du « monde ordinaire » : The Dependant World (le monde de la dépendance). On est en couple, ou on aspire à être en couple, ou on se demande pourquoi on « n’arrive pas » à être en couple  : on se conforme souvent malgré tout à ce que la société, nos parents, la culture, attendent de nous. C’est confortable, rassurant, sécurisant… mais on en est en partie dépendant.e. Parce que si on cherche à y échapper, l’amour, la reconnaissance, l’appartenance au groupe y étant conditionnels… on sait qu’on risque gros. Autrement dit, on n’est pas libre.

Son étape #2 est alors « le prix de la conformité » (The Conformity Price) : celui que payent au prix fort les gens qui enchaînent les couples (théoriquement) monogames, en se disant que « Si ce couple n’a pas marché, c’est parce que ce n’était pas le/la bon.ne », mais sans jamais se remettre en cause eux-mêmes, ou se poser de vraies questions.
Celui que sont prêt.e.s à payer celles et ceux qui trompent leur conjoint.e, parce que leur désir intérieur est trop fort, trahissant ainsi le contrat d’exclusivité qu’ielles ont passé, sans pour autant vouloir prendre le risque de remettre en cause leur « monde de dépendance », parce qu’ielles y trouvent leur compte, d’une manière ou d’une autre : ils trichent, mentent, vivent à deux vitesses. Combien de temps peut-vivre en se cachant derrière un masque ?
Le prix de la conformité est aussi celui de ces personnes qui s’ennuient dans leur couple, qui y sont frustré.e.s, voire qui y sont malheureux.ses et s’y sont résignées (j’ai connu).

C’est alors qu’on arrive à l’étape #3 : le réveil (ou l’éveil) de la conscience. Le retour à soi. Le moment où l’on se (re)connecte enfin à soi, à son vrai soi. Où on prend conscience de cette petite voix intérieure qui vous dit que : « Il doit bien y avoir autre chose au dehors, quelque chose en plus. » Que « ça n’est juste pas possible de continuer comme ça » que « si vous ne faites rien, vous allez vous flétrir à l’intérieur. »

J’ai souvent dit que pendant des années, j’avais l’impression d’être « morte à l’intérieur » : je n’étais plus moi-même. Je gérais le quotidien, je vivais en pilote automatique, mais je n’avais plus de désirs, plus d’envies ; plus de vision de moi à long terme, plus de projet de vie, plus de petite flamme intérieure.

Ce n’est que lorsque je suis sortie de cette longue hibernation intérieure… que j’en ai pris conscience. Quand on est dans le noir, on finit par s’habituer, et on oublie qu’à l’extérieur, le soleil brille. Quand je suis revenue à moi-même… que j’ai (re)découvert la force, la brillance, l’énergie de la vie en moi et à l’extérieur de moi… quel bonheur, quel soulagement. Et en même temps, au début on est ébloui.e, cela prend du temps de se réhabituer à la lumière, de refaire confiance à sa petite flamme intérieure, de se laisser guider par la voix de son désir, de son intuition.

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J’en connais certain.e.s qui, une fois sorti.e.s de la boîte – pour ne pas dire « cage » – dans laquelle ielles étaient enfermé.e.s depuis toujours, parce qu’ielles s’étaient toujours conformé.e.s à ce que leurs parents et la société, puis leur époux.se, patron, enfants attendaient d’eux/elles… ne savent pas dans quelle direction avancer. Ielles ont toujours habité leur boîte/cage, ielles ne se sont jamais posé la question de leur désir propre : de quoi ont-ielles envie eux/elles ? Qu’est-ce qui les fait vibrer ? Qu’est-ce qui réveille à l’intérieur leur petite flamme ?

Quand on a été tenu.e prisonnier.e toute sa vie des désirs des autres, quand on a toute sa vie chercher à les anticiper, pour leur faire plaisir, être accepté.e, éviter la réprimande, les gros yeux, le déshonneur, la peur de ne pas être à la hauteur des attentes… comment savoir ce qui vous convient ? Comment ne pas paniquer à l’idée de décider pour sa propre vie ? Va-t-on partir à gauche ? Ou bien à droite ? Ou bien encore ce tout petit chemin broussailleux qui semble nous appeler, nous. Mais… et si nous ne rencontrions personne sur ce chemin, si nous nous retrouvions tout.e seul.e, si nous étions exclu.e de la société des gens « bien » puisqu’on a décidé de « vivre sa vie » et que soudain ils risquent de nous rejeter ?

On commence à se poser des questions qu’on ne s’était jamais posé avant : qui je suis MOI ? Qu’est-ce que je veux, MOI ? Qu’est-ce qui me rend heureux.se ? Est-ce que cette relation-là me permet de me sentir moi-même, ou est-ce que je me sens entravé.e dans mes mouvements ? Est-ce que je sens que je suis libre de quitter cette relation à tout moment, et que la personne ne me retiendra pas par des mesures de rétorsion, de la culpabilisation, des mots méchants ?

On commence à s’interroger sur ce qu’est l’amour, l’amour vrai, l’amour véritable. On nous a fait croire que l’amour, c’était appartenir à quelqu’un, renoncer à sa liberté. Mais l’amour, le vrai amour, ne nous maintient pas en cage.

On lit Le Conte chaud et doux des Chaudoudoux : quelle merveille ! Où on comprend physiquement la différence entre les chaudoudoux, qui sont en nombre infini et font chaud et doux quand on en reçoit, et les « froids-piquants », que les gens préfèrent s’échanger quand ils ont peur de manquer de chaudoudoux (parce que sans chaudoudoux, on meurt), mais qui, quand on les prend dans ses mains, font tout froid et piquent.

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On comprend qu’on ne peut jamais changer les autres. Que si on veut changer notre monde, c’est à nous de travailler sur nous-mêmes, à nous de changer.
Le changement… commence par moi-même.
Alors… on se prépare au changement : ça sera l’enjeu de l’article de demain.

Et vous ? Êtes-vous connecté.e à votre petite voix intérieure, faites-vous confiance à votre intuition, ou bien vous sentez-vous parfois envahi.e par toutes ces voix normatives (de vos parents, de vos professeurs, de vos ami.e.s), qui vous disent ce qui se fait et ce qui ne se fait pas, qui veulent vous faire croire qu’elles savent mieux que vous ce qui est bon pour vous ?

Vous aussi, racontez-nous votre voyage intérieur vers vous vous-même, vers plus de vous-même. Où en êtes-vous ? L’espace des commentaires ci-dessous vous est réservé : hâte de vous y lire.

Au plaisir,
avec amour et bienveillance,

Isabelle

 

Une réflexion sur « Voyage en Polyamorie #4. 3. L’Éveil à moi-même »

  1. Voyage en Polyamorie #4 – Affirmation de soi

    Aujourd’hui, sur Facebook, Isa a observé que j’allais trop vite dans mon parcours narratif. En la lisant, j’ai réalisé que je ne peux pas aller à son rythme, puisque pour elle, l’arrivée de la polyamorie a provoqué un réel changement. En ce qui me concerne, cela n’a pas été une révélation, ni une transformation, mais bien la compréhension que mon mode de fonctionnement n’était pas erroné et que d’autres que moi vivaient des modes relationnels similaires. Ce qui m’a permis de m’affirmer face à mon psy et socialement.
    Donc, dans cette étape je vais expliquer de quelle manière cela m’a permis de me sentir bien plus en accord avec moi-même, de mieux comprendre comment je fonctionnais, de pouvoir le dire et de l’intégrer dans ma toute nouvelle pratique professionnelle.
    La carte du Tarot que j’ai tirée aujourd’hui est LE PAPE. La cinquième des grands arcanes. Elle représente un homme âgé, mûr et réfléchi. Elle symbolise la sagesse, la confiance, le conseil et l’écoute bienveillante. Je ne peux qu’y voir un lien très fort avec mon travail de praticienne en sexothérapie et l’espace de parole que j’ai ouvert pour accompagner les personnes qui souhaitent vivre ou vivent les relations sexo-affectives non exclusives consensuelles.
    Dans ma vie, il me semble y avoir eu deux constantes : un besoin irrépressible de liberté et le sentiment de ne pas être « comme les autres ». Déjà à la fac, j’ai reçu le reproche de ne pas vouloir travailler sous la houlette d’un directeur de recherche qui m’imposerait un sujet sur lequel travailler. J’ai accepté pour mon mémoire de maîtrise une thématique qui ne me passionnait pas, mais qui avait au moins l’aspect positif de concerner des cultures centraméricaines et correspondre géographiquement/culturellement au lieu où je souhaitais mener mes recherches. N’ayant pas très bien vécu l’expérience, j’ai décidé que, par la suite, je ne travaillerais que sur ce qui m’intéressait réellement. Et je m’y suis tenue. J’ai donc fait mes recherches en parallèle au monde académique, en ayant des emplois alimentaires qui me permettaient de faire ce que je voulais réellement. J’ai ainsi publié, donné des conférences, animé des séminaires et participé à des congrès. Loin du moule académique.
    En fait, je vivais entre deux mondes : celui qui me passionnait, me faisait intellectuellement vibrer et celui qui me donnait de quoi vivre matériellement, tout en m’intéressant. Je réalise, en l’écrivant, que cela se rapprochait étrangement à ce que je vivais dans ma vie personnelle : entre un monde intime qui me convenait et un monde social qui me permettait de donner le change, sans trop avoir à m’expliquer. Rien de bien équilibrant, ni de vraiment épanouissant. Dans ce sens, je ne suis toujours écoutée, j’ai suivi ce que je pensais bon pour moi, mais toujours en décalage par rapport aux normes sociales, tout en essayant de m’y tenir.
    Le fait d’avoir à m’affirmer face à mon psy, alors même que je m’engageais dans une nouvelle voie professionnelle a été un processus relativement rapide. Enfin, je me suis sentie en accord avec moi-même. Cela m’a apporté une grande sérénité, une paix intérieure immense et un bel équilibre émotionnel.
    Cela fait des années que j’écoute ma petite voix intérieure (en fait depuis la naissance de ma fille aînée), que j’ai appris à faire confiance à mon intuition et avancer ainsi, vers les objectifs que, régulièrement, je me décide d’atteindre. Seulement, cette voix subissait de nombreuses interférences, avec toutes les voix extérieures qui venaient me dire : « un jour tu vas te stabiliser, un jour tu vas rencontrer « l’homme de ta vie », un jour tu vas choisir un pays où t’installer, un jour tu … » Jusqu’à ce que je comprenne que ce n’était pas parce que je ne rentrais pas dans le moule social, que j’allais mal, mais bien parce que j’étais dans l’incapacité totale d’y rentrer, puisque cela aurait signifié m’oublier, me perdre moi-même, altérer l’essence même de qui je suis.
    Alors, j’ai opté pour m’accepter comme je suis, « hors-norme », mais bien dans ma tête et dans ma vie.
    J’ai décidé d’assumer pleinement le fait que je vis des relations sexo-affectives plurielles depuis toujours (y compris pendant mon étape « mariage ») et que c’est un mode de relations qui me correspond parfaitement. Que mon expérience de vie peut être aidante et qu’en ce sens, je peux la partager et m’en servir dans ma pratique professionnelle.
    Et non, je ne vais pas trop vite, car je ne suis pas arrivée là complètement toute seule, sans guide. Je ne pense pas avoir eu de « mentor », mais des lectures et des rencontres très aidantes, dont je parlerai demain.

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