21 JOURS pour des relations positives #21. Réciprocité

Un des éléments qui me paraît essentiel pour une relation positive entre deux personnes (qui vaut évidemment pour un groupe plus large), c’est qu’elle soit souhaitée et travaillée de part et d’autre.

En effet, comme je le disais à nouveau dans mon article #20 sur l’indulgence, on ne peut agir que sur sa « moitié » de la relation, comme si chacun·e tenait un des deux bouts d’une corde dans ses mains.
Si on avance vers l’autre avec des oreilles de girafe et les meilleures intentions du monde, mais qu’en face, l’autre nous tire dessus à boulets rouges, il y a un moment où notre devoir premier est de nous protéger.

femme_homme_corde_imagelargeDans son livre Pratique de l’amour, le sociologue Michel Bozon insiste sur cette notion de réciprocité, notamment dans les débuts d’une relation, mais je pense qu’on peut l’étendre à l’ensemble de la durée d’une relation.
En effet, quand on rencontre quelqu’un·e, l’idée est de se livrer progressivement : on donne quelque chose, l’autre y répond, nous donne quelque chose à son tour (une information, une confidence, un sourire, un regard…) et c’est ainsi que petit à petit, se construisent la confiance et le désir d’échanger plus.

31gnw2prohl-_sx305_bo1204203200_ Si, dans une relation, l’un·e donne toujours, et l’autre se contente de « recevoir » ou de « prendre », sans jamais « donner » à son tour… très vite, la relation va se trouver déséquilibrée (on rejoint là les idées de la Roue du consentement : #18).

Dans ses recherches sur les relations, notamment au sein d’un couple – mais pas seulement : et c’est bien là que c’est aussi intéressant aussi pour moi, qui cherche à définir des relations positives plus largement que dans une relation de « couple » -, John Gottman parle de « bids for connection », que j’ai un peu de mal à traduire (« offres de connexion » me semble trop renvoyer à des enjeux économiques… »Perches de connexion », comme on tendrait une perche ? « Tentatives » ?)

L’idée, c’est que quand on entre en relation avec quelqu’un·e, que ce soit pour acheter du pain ou avec son/sa partenaire de vie, on envoie des « signaux » : un mot, un geste, un regard, un sourire.
De la manière dont l’autre va y répondre, et dont on y répondra à notre tour, va dépendre la suite de l’échange.

John Gottman identifie trois manières de répondre :

  • turning toward : se tourner vers
  • turning away : se dé-tourner
  • turning against : se tourner contre

Exemple : quelqu’un·e s’adresse à un·e collègue à son bureau en lui disant : Je vais déjeuner, est-ce que ça t’intéresse de venir avec moi ?, lui envoyant très clairement une « proposition de connexion ». L’autre peut répondre :

  1. Oui, avec plaisir.
    Ou : Je dois d’abord finir quelque chose, mais je te rejoins ensuite.
    Ou : Pas possible aujourd’hui, mais demain pour sûr !
    Dans les trois cas, ielle se « tourne vers » son interlocuteur·trice, lui envoyant à son tour un « signal de connexion », maintenant ainsi le canal de connexion ouvert entre elleux.
  2. Non, merci (sans relancer). 
    Ou : Est-ce que tu as vu passer le mail de Machin ? (Ne répondant pas à la proposition, dé-tournant la conversation).
    Dans un cas comme dans l’autre, ielle se « dé-tourne« , ce qui ferme la discussion, et n’encourage pas vraiment la première personne à réitérer son offre une fois suivante.
  3. Tu n’as vraiment rien de mieux à faire qu’aller manger alors qu’on a tellement de travail ?
    Ielle se « tourne contre« , attaque, voire agresse, et fait plus que fermer la discussion.

En fonction, ensuite, de comment la première personne réagira, la conversation s’en tiendra là (dans les deux derniers cas, la plupart du temps, les gens n’y reviennent pas…) ou aura une chance d’être relancée.

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Une fois qu’on a repéré ces trois manières de répondre, il est extrêmement intéressant de les observer à l’œuvre dans nos relations de tous les jours.

Par exemple, si on a commis un impair et qu’on présente des excuses sincères (bid for connection) mais que l’autre, au lieu d’accepter vos excuses et de passer à autre chose, continue à vous faire la tête (turning away), voire des reproches (turning against), ça ne donne que moyennement envie de venir s’y re-frotter… sauf si on n’a pas le choix (dans le cas par exemple d’un enfant avec son parent), ou si on tient vraiment à la relation et qu’on s’attache à entendre (en faisant preuve d’une grande intelligence émotionnelle) combien l’autre a vraiment été très blessé·e ou mis·e en colère : cela va alors prendre du temps pour réparer la relation.

Autre exemple avec un enfant qui renverse un verre de jus d’orange sans le faire exprès : il est bien embêté, et souvent, de lui-même, va présenter ses excuses.
À quoi bon alors continuer à le houspiller : Tu pourrais faire attention, quand même ! Combien de fois je t’ai dit de ne pas mettre ton verre au bord de la table ? Ce qui le conduit inévitablement sur la défensive.
Il est bien plus efficace – à court, moyen et long terme – d’accueillir ses excuses, et de le laisser réparer sa maladresse (qui est une « maladresse » et non une « bêtise » : les mots comptent…).

Cet exemple avec un enfant vaut en réalité pour toutes nos relations : si on tient à elles et qu’on veut le bien de notre partenaire, une relation, ça s’entretient, comme le disent Franklin Veaux et Eve Rickert dans More Than Two, comme une plante ou un jardin.
Si on n’y met que des déchets, que du négatif, petit à petit, elle va s’étioler.
Si on veut qu’elle grandisse, s’épanouisse, mieux vaut la nourrir de nutriments positifs, de petits mots gentils, câlins et autres douceurs relationnelles.

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À nouveau, on ne peut pas changer les autres, et on n’est responsable que de la moitié d’une relation.
Si l’autre est négatif·ve, toxique, voire abusif·ve… si on le peut, le mieux que l’on puisse faire, c’est couper court aux échanges et se protéger – voire fuir.

C’est en travaillant au quotidien, dans chaque petit détail de la vie, dans chaque échange, qu’on contribuera à créer avec un·e autre une relation heureuse, épanouie, positive.

Et pour cela, il est important d’être à l’écoute, de soi-même et de l’autre. D’être capable d’exprimer ses émotions, ses désirs, ses besoins, ses demandes… et aussi – tout aussi important – d’être capable d’entendre les émotions, les désirs, les besoins, les demandes, de l’autre.
En présupposant de sa part de la bienveillance envers nous et notre relation – autrement dit (3ème accord toltèque), sans rien prendre « personnellement » : sans imaginer qu’ielle se « tourne contre » nous.

J’étais partie pour 21 articles… je crois bien qu’il m’en faudra au moins un 22ème…
En attendant, hâte de lire vos commentaires.

Au plaisir,
avec amour et bienveillance,
Isabelle

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