ÉTHIQUE RELATIONNELLE #21. Respect et Confiance

… Où il est important, aussi, d’entretenir avec soi-même une relation éthique : d’être à sa propre écoute, de savoir s’accueillir avec bienveillance, tolérance, non-jugement et… indulgence.

Me voici donc arrivée au terme de ce nouveau défi que je m’étais lancée à moi-même, ces 21 jours d’articles sur le thème de l’éthique des relations.

Je me rends compte que j’ai finalement parlé plus souvent que je ne l’avais imaginé des relations plurielles consensuelles, et notamment de celles que l’on désigne sous le terme-parapluie de polyamorie (rappelons que le libertinage est aussi une forme de non-exclusivité consensuelle, qui renvoie le plus souvent plus spécifiquement à des relations sexuelles, tandis que l’adultère est certes, une non-exclusivité, mais non-consensuelle par définition, puisqu’au moins l’une des personnes concernées n’est pas même au courant).

De nombreux livres m’ont inspirée lors de mes réflexions, et notamment More Than Two, du blog du même nom, écrit à quatre mains par Franklin Veaux et Eve Rickert, et à qui je tiens à rendre hommage ici : c’est sous leur plume, en effet, que j’ai notamment pris conscience de la différence entre des accords d’un côté, qui sont passés entre toutes les personnes concernées, et des « règles » de l’autre, qui potentiellement s’appliquent à une tierce personne ; de même que la différence entre poser ses propres limites d’un côté, et imposer des règles à quelqu’un·e d’autre, de l’autre.

C’est encore à elleux que je dois une partie de ma réflexion sur les droits qu’ielles ont appelé les « droits de la personne en relation secondaire« , autrement dit d’une personne qui serait en relation avec des personnes déjà elles-mêmes en relation dite « primaire ».
J’avoue cependant que ces termes « primaire » et « secondaire » qui renvoient, pour moi, à une échelle de « hiérarchie » (rankingsupposée entre les personnes (ou les relations) me posent problème en eux-mêmes. Il n’est cependant pas toujours simple de trouver de bons mots pour décrire des situations inédites jusqu’à présent dans les relations (dans mon article #20, j’ai par exemple choisi d’employer le terme de partenaire « historique », pour désigner une relation antérieure à une autre).
Pour celleux que ça intéresse et qui lisent en anglais, je ne peux que vous encourager à prendre connaissance du « Secondary Bill of Rights » écrit par Franklin Veaux en 2013.

Au final, j’ai la sensation que les éléments les plus importants à cultiver dans des relations, quelles qu’elle soient, sont le respect mutuel, en toutes circonstances, et la confiance – confiance en soi, confiance en l’autre, confiance en la relation.

Dans mon Voyage en Polyamorie, j’ai souvent opposé l’Amour d’un côté, la Peur de l’autre.
En réalité, je crois qu’ils correspondent aussi à la Con-fiance d’un côté, la Dé-fiance de l’autre :

  • avoir confiance que son/sa partenaire est quelqu’un·e de fiable, qu’on peut se fier à sa parole, se sentir en sécurité qu’ielle ne fera jamais rien « contre nous » et que, s’il lui arrive de faire quelque chose qui nous perturbe, c’est dans tous les cas « pour ellui » (Ne rien prendre personnellement » : 2ème accord toltèque) ; l’autre soir lors d’un groupe de parole, une femme nous racontait que son mari, quand il la sentait perdre pied, la rassurait en lui disant : Je ne suis pas contre toi.
  • par opposition à se sentir en « in-sécurité », se méfier de l’autre, et en conséquence, une fois que notre système d’alerte interne a été activé (à juste titre ou non), percevoir la réalité à travers un filtre déformant « parano » qui nous fait interpréter tout dans un sens qui nous est défavorable.

Philippe Jeammet, psychiatre qui vient de publier un livre sur les émotions (Quand les émotions nous rendent fous) oppose précisément ces deux états émotionnels : la confiance d’un côté, la peur de l’autre. (À ce propos, je vous invite à écouter en podcast l’excellente émission de La Tête au Carré sur France Inter).

Quand votre partenaire a envie de passer du temps avec une autre personne, plutôt que de vous focaliser sur le « manque », la bouteille à moitié vide, et de vous demander pourquoi ielle n’est pas avec vous… pensez plutôt à la bouteille à moitié pleine : à tous ces moments passés ensemble, à ce qui fait qu’ielle revient, est revenu·e et reviendra encore vers vous, pour tout que vous avez co-créé ensemble, pour cette relation forte que vous avez ensemble.

L’enjeu de la confiance me renvoie à ce mantra qui me vient de Susan Jeffers, ma gourou en chef, celle qu’aucun·e des dizaines d’auteurices que j’ai lu·es depuis des années n’a réussi à détrôner :

Whatever happens, I’ll handle it.

C’est le mantra qui me renvoie à la Déesse intérieure en moi, cette confiance absolue que quoiqu’il arrive, je m’en sortirai. C’est aussi celui qui dit : Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. 

Susan Jeffers est aussi l’autrice qui a écrit le super Feel The Fear and Do It Anyway. Il ne s’agit pas de ne « plus avoir peur« , ni de « lutter contre sa peur« , ni encore de chercher se convaincre qu’il n’y a « aucune raison d’avoir peur » (avez-vous déjà essayé de « raisonner » un enfant qui a peur que quelqu’un soit caché derrière ses rideaux ?), mais bien d’accueillir la peur en nous, comme il s’agit d’accueillir en nous toutes nos émotions, qui sont là, qui sont légitimes, qui sont nos alliées pour nous aider à comprendre ce qu’il se passe en nous, et, une fois qu’on l’a accueillie, acceptée, regardée en face, d’y aller quand mêmeNe pas attendre de ne plus ressentir la peur pour faire le premier pas.

Et puis, petit pas à petit pas, chaque jour de mieux en mieux… avancer sur le chemin qui est le nôtre.

L’enjeu, quand on entre en relation avec quelqu’un·e, est de créer de l’intimité, de se relier à ellui d’une manière authentique. De ne pas tricher, de ne pas faire semblant. Si on a peur de lea perdre, partager cette peur avec ellui, la lui faire connaître… en espérant qu’ielle saura l’accueillir sans jugement et dans la bienveillance. Et si ça ne le fait pas… alors c’est que ça ne devait pas le faire, et passer son chemin.

C’est en s’ouvrant peu à peu à l’autre dans la confiance et dans l’amour, que se crée jour après jour entre nous une intimité qui nous rend à la fois plus vulnérable et plus fort·e l’un·e et l’autre.

Rien ne sert de construire des barricades autour de notre relation : si l’autre doit un jour partir, rien ni personne ne pourra jamais lea retenir contre son gré. Les « règles » que l’on cherche à imposer à l’autre pour apaiser nos propres craintes… sont comme autant de barreaux de prison : l’autre y restera tant que cela lui conviendra aussi… et puis si un jour cela ne lui correspond plus, ielle les franchira.
Rien ne sert de lutter contre le courant : mieux vaut se laisser porter.

L’autre est un miroir pour moi. Quand quelqu’un·e me parle de moi, en réalité, ielle me parle d’ellui. Et si moi je suis tenté·e de lui faire un reproche, me poser la question : qu’est-ce que cela révèle… de moi ? Qu’est-ce qui me dérange en l’autre qui, en réalité, me renvoie à moi et à mes propres ombres ?

Une relation intime me permet de petit à petit mieux apprendre à aimer, mieux apprendre à m’aimer moi, mieux apprendre à aimer l’autre, et de devenir une meilleure version de moi-même.

Là encore, les écrits de Susan Jeffers sont une source d’inspiration constante pour moi. C’est elle qui a écrit Embracing Uncertainty, elle encore à qui j’ai emprunté mon fameux petit « … – ou pas » qui m’aide tant au quotidien pour apprendre à lâcher prise sur les attentes et m’ouvrir à ce que la vie m’apporte : rester curieuxe, ouvert·e, cultiver en soi sa capacité d’émerveillement.
Susan Jeffers encore qui parle d’accueillir en soi au moins « un waouh par jour«  !

L’enjeu est d’apprendre à s’aimer soi-même, à être soi-même, pour pouvoir s’ouvrir à l’autre : c’est le fameux « moi-m’aime« .

Si je sais que quoiqu’il arrive, je serai là pour moi, parce que je suis mon propre parent intérieur qui vient rassurer mon « enfant intérieur » – qu’il y a quelques jours, j’ai soudain visualisée comme « mon enfant autiste » – alors je ne crains plus l’autre. Car je sais que l’autre, ellui aussi, fait du mieux qu’ielle peut, et ne fait rien « contre moi », mais « pour ellui ». Et je peux avoir confiance en ellui pour ne pas me vouloir de mal. Je peux alors m’ouvrir à ellui, comme ielle peut s’ouvrir à moi : dans l’accueil et la bienveillance.

Respect – regarder l’autre comme un·e autre, comme une merveille de la vie, aussi libre et légitime que moi – et confiance – confiance en moi, confiance en l’autre, confiance en la relation – sont pour moi les deux piliers d’une relation positive et éthique à l’autre.

Hâte de lire vos commentaires.

Au plaisir,
avec amour et bienveillance,
Isabelle

NB. Si vous souhaitez m’encourager à écrire mon livre sur la polyamorie et les relations positives et éthiques, vous pouvez :
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