4ème étape de ce voyage en polyamorie, on n’en est encore qu’au tout début – prise de conscience qu’on vit dans un monde qui semble marcher la tête à l’envers, où les gens qui prétendent s’aimer se font des reproches, se jugent, se blessent les uns les autres ; un monde et une société où, comme l’écrit Miguel Ruiz dans Les Quatre Accords toltèques, les gens sont guidés par la peur plutôt que par l’amour… et où la peur des un.e.s alimente la peur des autres ; un monde où règne la « guerre des sexes », où on essaie de nous faire croire que « les hommes sont comme-ci, les femmes comme ça » et qu’on ne pourra jamais s’entendre ; un monde où on nous dresse les un.e.s contre les autres, les prétendus prédateurs contre les prétendues proies, les bourreaux contre les victimes (allez donc voir Zootopie : quel film merveilleux, pour petit.e.s et grand.e.s) ; un monde de pénurie (Vous n’avez droit qu’à un.e seule partenaire, et ça, pour le plus longtemps possible : alors choisissez bien !) plutôt que d’abondance (Nous sommes des milliards sur terre : c’est sûr qu’il y en a beaucoup parmi ceux/celles-ci avec lesquel.le.s vous pouvez avoir envie de faire un bout de chemin) ; un monde où nous dit que « il faut souffrir pour être belle » (hein ?), que « qui aime bien châtie bien » (quoi ?) et que « on ne peut aimer qu’une seule personne à la fois » (ah bon ?) ; un monde où on mesure la réussite d’une relation à sa durée et non au bonheur qu’elle nous procure jour après jour…
Et puis un jour, cette petite flamme de vie tout au fond de nous qui nous souffle que « c’est sûr, il y a nécessairement une autre manière de vivre et d’être en relations les un.e.s avec les autres« . Sauf que, aller à l’encontre de tout ce qu’on nous a toujours appris et asséné depuis qu’on est tout.e petit.e… demande du courage, de la force, de l’énergie et une sacrée dose de confiance en soi.
Alors peut-être plutôt qu’aller « contre » et se définir en négatif, on peut choisir d’aller « avec », dans le sens de ce qu’on sent, nous, au fond de nous.
Le changement commence par moi-même. Si je me change, moi, et que les autres me voient heureux.se ainsi… peut-être qu’ielles se poseront des questions à leur tour et auront envie de changer aussi… – ou pas : ça leur appartient, et ielles sont libres.
Moi aussi.
« Je ne sais pas où je vais… mais j’y vais. »
Alors c’est décidé, on se lance, on veut vivre autrement, libre. Ce qui ne veut pas dire seul.e, mais en relations avec d’autres personnes qui, comme nous, auront fait ce choix de vivre selon leur cœur, en suivant leur intuition, et non les injonctions de ces milliers de petites voix à l’intérieur de leur tête, héritées de nos ancêtres, de nos pairs, de nos peurs ; d’autres personnes qui respecteront nos choix, nous accepteront tel.le.s que nous sommes, sans essayer de nous changer ; d’autres personnes avec lesquelles on pourra être nous-même, et de plus en plus nous-même.
On a décidé de s’embarquer dans ce voyage vers l’inconnu, mais – restons raisonnable – pas n’importe comment, quand même. Alors on se prépare. On se documente, on fait des recherches sur Internet, on lit, on participe à des forum, on visionne des films. D’autres l’ont fait avant nous, d’autres vivent déjà différemment, et si d’autres l’ont fait, et ont l’air heureux.ses ainsi, alors pourquoi pas nous ?
En termes de dramaturgie, cette étape que j’appelle « La Préparation au voyage » correspond dans The Writer’s Journey, à la rencontre avec un « mentor » ou un guide.
Pour moi, c’est quand, après m’être conformée pendant des années à la norme de la monogamie (#2) et en avoir payé le prix (#3), quand soudain après « l’incident déclencheur » qu’a représenté ma séparation d’avec le père de mes enfants (#4), j’ai ouvert les yeux et me suis sentie renaître à 40 ans (ça, c’est pour donner de l’espoir aux plus jeunes !), un de mes proches amis m’a parlé pour la première fois de ce que lui appelait « polyamour » : m’ouvrant alors la porte sur tout un autre monde possible.
[Rappelons que plutôt que « polyamour », je préfère moi, parler de « polyamorie« , « amours plurielles », lutinage ou bien encore « relations non-exclusives consensuelles et éthiques » tandis que mon amie Elisende Coladan, anthropologue et sexothérapeute, propose, d’après Brigitte Vasallo, universitaire espagnole : « relations non-monogames inclusives » ; et des Américains : CNM pour Consensual Non Monogamy. Ouf !La réalité est que dès qu’on sort du cadre normé pré-établi – et implicite par défaut – de la monogamie et des relations exclusives (si j’ai une relation avec toi, je renonce à toutes les autres), on n’a rien dit d’autre que : puisqu’il n’y a plus ce cadre implicite, à nous de définir le cadre explicite qui nous convient.]
Pour moi, c’est donc cet ami qui venait lui-même de découvrir le mot et le concept grâce à une amie américaine, qui m’a donné à lire mes premiers livres sur le sujet : ceux, en français, de Françoise Simpère (qui m’a la joie et l’honneur de témoigner dans mon film) : Aimer plusieurs hommes et Le Guide des Amours plurielles ; et celui qui a servi de référence en anglais pendant des années avant d’être enfin traduit en français il y a deux ans : The Ethical Slut (La Salope éthique).
J’en ai ensuite découvert quelques autres, dont ceux de Yves-Alexandre Thalmann, que je trouve très accessibles pour une première approche (et plus courts que The Ethical Slut) : Vertus du polyamour et Les 10 plus gros mensonges sur l’amour et la vie de couple.
Ensuite, j’en ai dévoré un paquet, et s’il y a parmi vous que ça intéresse, je pourrais vous en parler plus précisément. Si aujourd’hui, je ne devais en retenir que deux… allez, disons trois, ce serait More Than Two (très pratique et concret, plein d’histoires et d’erreurs à ne pas commettre), Opening Love (sur un aspect plus spirituel) et Sex At Dawn (qui démonte un par un les mythes sur lesquels sont construites les injonctions à la monogamie qui prévalent dans nos sociétés).
Vous trouverez aussi sur le site de LUTINE des liens vers des documentaires ou des reportages qui ont été réalisés il y a quelques années.
Il y a désormais aussi de nombreux sites, blogs et forum sur Internet, à commencer par l’incontournable polyamour.info, mais aussi amours.pl et polyamour.be en Belgique, et puis les groupes Facebook.
Vous trouverez dans de très nombreuses villes (Paris, mais aussi Lyon, Toulouse, Strasbourg…) des « cafés poly« , conçus sur le modèle des « café philo », où l’on discute des relations plurielles, mais aussi maintenant souvent des goûters, et l’été des pique-niques, et depuis peu, des groupes de parole et de soutien (toutes infos sur l’onglet « événements » de polyamour.info).
Enfin, un endroit où rencontrer d’autres gens qui, comme vous, ont envie de vivre autrement, et avec la sécurité de l’anonymat, est le site de rencontres sur Internet okcupid.com (« cupid » signifiant en anglais « Cupidon », le dieu de l’amour, et non l’avarice !).
[Okcupid mériterait que j’y consacre un article entier : je me contenterai aujourd’hui de glisser quelques notes pratiques dans les commentaires. Juste en quelques mots : le site est gratuit, il offre la possibilité d’indiquer si on souhaite des relations monogames ou non, on peut y indiquer « open relationship » et même lier son compte à celui de son/sa partenaire ; et les pourcentages de « matches » (pour lesquels on détermine soi-même l’algorithme, en fonction de ce qui – pour vous – est important, très important ou pas important) marchent : répondez à au moins 100 ou 200 questions (pour que ça ait un minimum de valeur) et… amusez-vous ! ]C’est petit à petit, au fur et à mesure de mes lectures, de mes rencontres, de mes discussions, en me cherchant, en me confrontant à mes doutes, mes ambivalences, mes peurs, mais aussi aux autres, aux doutes, ambivalences et peurs des autres… que je me suis rapprochée de moi-même, de qui je suis vraiment, au fond, que j’ai pu mieux définir ce que j’attendais de la vie et d’une relation.
Si au début, on ne sait pas toujours ce qu’on veut, parce que tant qu’on ne l’a pas vécu, on ne sait pas toujours que ça existe, ou que c’est possible… en tout cas, on sait ce dont on ne veut plus : trop de compromis, concessions, sacrifices, au prix de soi-même, de son bien-être et de son libre-arbitre.
À nouveau, quoiqu’on fasse, on ne peut pas et on ne pourra pas changer les autres. On ne peut que se changer soi-même.
Si on prend envers soi-même l’engagement de s’aimer, de se respecter, d’assumer ses responsabilités, d’être honnête… alors on rencontrera des gens qui auront le même respect envers eux-mêmes et envers la relation qu’on pourra nouer ensemble.
Et vous, où en êtes-vous de votre préparation ? De vos réflexions ? Vous sentez-vous prêt.e à sauter le pas ? Car on embarque… demain !
Au plaisir de vous lire dans les commentaires : l’espace ci-dessous vous est réservé !
À demain, avec amour et bienveillance,
Isabelle