Meta – Extrait interview

« Une femme qui a plusieurs amoureux – ou amoureuses – notamment en tant que mère, va beaucoup s’exposer au regard méfiant de la société. Donc l’idée, plutôt que d’appliquer un « Pour vivre heureux, vivons cachés » – ce qui aurait signifié aussi : vivre cachés de nos enfants – c’était, avant que ma fille ne soit en âge d’être confrontée au préjugé social, de faire en sorte de changer ce préjugé.

Nous, on a choisi de vivre de façon à inclure les gens qui rentrent dans la vie des uns et des autres. Ça nous paraît un meilleur moyen d’être heureux, d’être équilibrés, que de se mentir, de se cacher, de se faire du mal pour rien, de se quitter. Nous, c’est comme ça qu’on pense – chacun tâtonne… – qu’on peut contribuer à faire un enfant heureux.»

Meta

ISA
Je voulais aussi qu’on parle du polyamour comme un concept féministe. Est-ce c’est quelque chose que tu présenterais comme ça ?

META
C’est quelque chose que je présenterais complètement comme féministe, au sens où l’un des principes de base du polyamour, c’est que chaque partenaire a les mêmes droits. Et qu’on ne prend pas des libertés qu’on n’autoriserait pas à l’autre.
Parce que pour un homme, devenir polyamoureux, c’est justement renoncer à son privilège d’homme. Et donc moi, à titre intime et personnel, je trouve ça très émouvant un homme qui dit : « Ben voilà, je t’aime, tu es une femme, je t’aime, et tu es aussi libre que moi. »

 

Et aussi :
« Je pense que l’image du polyamour se démarque énormément notamment des concepts traditionnels de polygamie, grâce aux femmes. Parce qu’évidemment c’est très difficile de distinguer un polygame macho phallocrate qui a deux trois femmes à sa botte, etc, d’un polyamoureux qui a deux trois amoureuses qui sont parfaitement libres, consentantes et poly aussi. Au premier regard, c’est pas évident. Tandis que le fait de voir des femmes qui assument publiquement d’avoir des relations avec plusieurs hommes et y compris des relations de long terme et de projet de vie, ça tranche complètement.
Là, on est totalement à l’antithèse de la polygamie traditionnelle. L’image interroge plus, mais aussi elle est beaucoup plus positive, justement parce qu’elle porte cette idée d’émancipation, contrairement à la polygamie traditionnelle qui porte une idée de domination et de soumission très forte.

Les femmes polyamoureuses portent vraiment très fort une idée d’émancipation qu’il est beaucoup plus difficile pour les hommes de porter parce qu’ils doivent se défendre de cette espèce de culture machiste.
Pour un homme, devenir polyamoureux, c’est justement renoncer à son « privilège d’homme » – et donc moi à titre intime et personnel, je trouve ça très émouvant un homme qui dit : « Je t’aime, tu es une femme, je t’aime et tu es aussi libre que moi. »
Il y a un vrai équilibre : la femme peut le porter de façon politique et l’homme de façon émotionnelle, de façon très forte et certainement pas moins significative.

Maintenant que les femmes ont pu déconstruire et ont pu se libérer de leurs chaînes physiologiques, les hommes et les femmes sont confrontés à un travail d’affranchissement de leurs chaînes psychologiques.
Et c’est fabuleux à faire ensemble, parce que là justement, on est tous dans la même galère : on a tous besoin d’affronter les mêmes difficultés de jalousie, de possession…
On doit apprendre à s’écouter, se regarder, écouter l’autre, essayer de prendre du recul sur soi, de façon à ne plus laisser la culture, qu’on nous a inculquée très profondément, gérer systématiquement notre comportement.
Et finalement, c’est faire preuve d’une indépendance, d’une liberté et d’une franchise intellectuelle, qui me paraît être totalement cohérente avec le mouvement féministe. »